sábado, 4 de noviembre de 2017

Au Caracol d'Oventik, des dizaines de milliers de personnes accueillent le Conseil Indigène de Gouvernement

L’heure est venue de secouer ce pays : le CIG à Oventic

article de Radio Zapatista
mercredi 1er novembre 2017
Reportage de Radio zapatista, photos de Radio Zapatista et du Centro de Medios libres.
Traduction 7NubS

L’heure est venue de secouer ce pays – Le Conseil Indigène de Gouvernement et sa porte-parole à Oventic

« Les puissants sont là où ils sont parce que c’est nous qui les avons laissé faire », fit part Guadalupe Vásquez, conseillère tsotsil des Altos du Chiapas et survivante du massacre d’Acteal [1]« Mais il est temps d’unir enfin les forces… de faire bouger le monde… de montrer que nous sommes capables de soulever nos peuples… que le monde entier sache que les peuples originaires sont toujours vivants et vont continuer à lutter pour obtenir leur liberté, pour ne plus permettre l’oppression, pour ne plus permettre l’injustice ».


Qui était présent au Caracol d’Oventic le 19 octobre 2017 dernier n’avait pas moyen de ne pas s’en rendre compte : les peuples originaires sont plus qu’en vie. Plus de dix mille personnes remplissaient le caracol, entre bases de soutien zapatistes, peuples du CNI, adhérents à la Sexta, conseillers et conseillères du Conseil Indigène de Gouvernement (CIG). La brume, cette brume si caractéristique des premiers jours du soulèvement de 1994, couvrait les montagnes et plongeait les contours dans le flou, de telle manière qu’il était impossible de distinguer le bout de cette mer humaine réunie sur place, dans ce qui constitua le dernier jour de la tournée du CIG en territoire zapatiste.
La caravane avait été reçue à l’entrée du caracol par une commission d’autorités, toutes femmes, porteuses de bâtons de commandement. Une cérémonie solennelle et festive en même temps, avec les hourras criés par des milliers de bases zapatistes alignés en double file pour souhaiter la bienvenue à ce nouveau gouvernement qui englobe, pour le moment, 63 régions indiennes du pays, parlant 39 langues, et représentés par 156 conseillers et conseillères.
C’est ainsi que Marichuy et les conseillers et conseillères parcoururent le long chemin qui donnait sur le terrain de sports jusqu’à l’estrade, sous la garde de centaines de miliciens. Là, sur l’estrade, ce que nous avions vu et écouté durant les six derniers jours prenait tout son sens. La douleur et la rage face à la destruction et la spoliation de tout, face à la mort provoquée par le système qui écrase tout, qui humilie tout, qui viole tout. Une douleur rendue tangible, au travers des paroles du comité Eureka, qui lutte depuis 1977 pour les disparus ; des paroles des mères et des pères des 43 étudiants disparus de la normale d’Ayotzinapa ; des paroles de la conseillère tsotsil des Altos du Chiapas, survivante du massacre d’Acteal : « Ma parole est véritable, parce que je l’ai vécu, parce que personne ne me l’a raconté, parce que j’étais présente. Ce n’est pas dur pour moi de croire que les injustices ont lieu dans le monde entier ». Mais face à la douleur et à la rage, face à la mort, le surgissement d’un soulèvement pour la vie, et l’invitation à construire un monde autre, depuis en-bas.
Quelques paroles de Marichuy :
« En-bas, depuis les profondeurs de la terre, la dignité fait naître un nouveau monde au milieu de la destruction, de la douleur et de la rage de nos peuples et du Mexique d’en-bas, dans les campagnes et dans les villes. De celle du peuple travailleur, qui est exploité jusqu’à sa mort, spolié de tout ce qu’il possède, réprimé pour réfléchir et se révolter, méprisé pour être différent, être pauvre, être femme, pour le fait de parler notre propre langue, pour dire la vérité, pour regarder vers en-bas et non pas vers en-haut, pour se retourner et regarder en direction de la compañera, du compañero et non du possédant, du cacique, du patron, du mauvais gouvernement. Et c’est pour cela que nous disons de nouveau que l’horloge de ce que nous sommes en tant qu’humanité marque maintenant l’heure de ce que nous sommes, de ce que nous fûmes et de ce que nous serons. »
Comme dans les autres endroits, la femme indigène fut mise en avant. « Les femmes indigènes, à travers notre triple condition de femmes, d’indigènes et de pauvres, nous vivons la majeure partie des oppressions au sein de ce système qui est appelé capitaliste, nous sommes exploitées et violées dans nos foyers, à notre travail, dans tous les espaces de la société », dit Marichuy. « Mais justement parce que nous sommes celles qui ressentons la plus profonde douleur, parce que nous vivons la majorité des oppressions ; nous devons aussi pour cela être capables de transformer ces rages en organisation, avec la finalité de passer à l’offensive afin de démonter le pouvoir d’en-haut, et construire avec détermination et sans peur le pouvoir d’en-bas. »
De manière identique, la commandante Hortensia, parlant au nom du Comité Clandestin Révolutionnaire Indigène – Commandement Général de l’EZLN, s’adressa directement dans la seconde partie de son discours aux femmes du Mexique et du monde, réalisant un décompte détaillé de la violence subie par les femmes tant à la campagne qu’à la ville et invitant à l’organisation. Et elle mentionna : « C’est la première fois dans l’histoire du Mexique qu’une femme indigène va dire que nous avons la capacité de gouverner un pays. Et lorsqu’elle dit qu’elle le peut, c’est nous toutes qui le disons avec elle ».
Marichuy annonça qu’à partir du mois de novembre, le CIG parcourra le pays selon un agenda qui sera rendu public dans les prochains jours. La commandante Hortensia expliqua : « Nous, les peuples zapatistes, sommes aux côtés de la porte-parole, du Conseil Indigène de Gouvernement et du Congrès National Indigène, ce sont eux et ce sont elles qui vont remplir la mission de parcourir le pays pour dire et pour écouter la vérité, et aussi pour les inviter à lutter. »
Mais elle fit savoir : « Ils vont tenter de faire l’impossible pour qu’une femme indigène ne parle pas ni ne puisse écouter ». A quatre jours du début du processus de collecte des signatures en vue de formaliser la candidature de Marichuy, c’est déjà une évidence. Marichuy a fait une dénonciation détaillée des formes par lesquelles l’Etat a tenté de saboter le processus afin d’éviter la candidature. Malgré, et à cause de cela, Marichuy fit savoir qu’ils ne reculeraient pas, qu’elles parcourraient le pays pour écouter et inviter à s’organiser, et développer un agenda national à partir de groupes de travail sur la terre et le territoire, l’autonomie, les femmes, les jeunes et les enfants, les personnes aux capacités différentes, les migrants, la diversité sexuelle, la justice, le travail et l’exploitation.
Après les paroles eut lieu un spectacle simple mais émouvant, fait de danses très symboliques et d’une pièce de théâtre qui poussait à imaginer ce que pourrait être un débat entre la politique traditionnelle et la forme autre qu’ont les peuples de faire de la politique.
Comme si cela avait été planifié, vers la fin du spectacle la brume présente à Oventic s’est dissipée, et le chemin fut de nouveau distinctement visible derrière les barrières décorées de fleurs de l’entrée du caracol. La tournée du Conseil Indigène de Gouvernement en territoire zapatiste arrivait à son terme, signalant le commencement d’un long chemin.

[1Le 22 décembre 1997, après des mois de harcèlement qui ont vu la fuite de milliers d’indiens tsotsiles des alentours de la municipalité de Chenalho, des forces paramilitaires attaquent et massacrent 45 femmes et enfants réfugiés dans une église, dans la communauté dite de Las Abejas d’Acteal. Les survivantes, survivants et l’organisation Las Abejas n’ont eu de cesse depuis de dénoncer la complicité des forces militaires et la politique contre-insurrectionnelle contre le soulèvement zapatiste ayant abouti à ce massacre, des centaines d’autres assassinats et le déplacement forcé de dizaines de milliers d’indiens pro-zapatistes dans diverses régions du Chiapas.

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